Dimanche ensoleillé à Neuchâtel. Il y a des gaufres, des ballons, une marchande de pierres « semi-précieuses ». Le Jardin anglais est animé aujourd’hui par un marché. À la place de jeux, un groupe d’enfants part joyeusement à l’assaut d’une balançoire. Mais leurs parents les rappellent avec douceur: l’accès à cette imposante structure leur est interdit, ainsi que l’indique un écriteau. On imagine la déception. La débâcle. L’angoisse.
Soutenue par la ville de Neuchâtel, l’association Cerebral a initié ce projet de nacelle-balançoire pour les enfants en situation de handicap. L’objectif? « Intégrer les personnes en chaise roulante, en particulier les enfants, dans les espaces de détente publics« . Paradoxalement, j’ai été à la fois réjoui et dérangé par la découverte de ce projet.
Inclusion
Réjoui, parce que la rue n’est que trop peu pensée pour être pratiquée par des personnes en situation de handicap: marches impossibles à escalader, espace trop important entre le bus et le trottoir, absence d’aides pour les personnes malvoyantes. Toute initiative qui permet à ces individus de s’approprier leur espace de vie est donc bonne à prendre. Pour que chacun·e ait sa place. Physiquement.
Dérangé, parce qu’en luttant contre une exclusion, cette action en refabrique une autre: certains enfants n’ont pas accès à ce jeu. Certes, cette mise à l’écart des bambins qui ne sont pas en chaise roulante est infiniment minime par rapport à ce que subissent des enfants en situation de handicap. Et certain·e·s diront peut-être que c’est de bonne guerre. Il y a probablement en outre des raisons valables à cette interdiction: mesures de sécurité, prévention de l’usure.
Mais quand même, pourquoi s’amuser à côté et non à tour de rôle? Tout en accordant la priorité aux enfants en chaise roulante, pourquoi ne pas profiter de ce joli geste pour fabriquer du commun?
Je ne peux m’empêcher de rêver d’un jeu – et le théâtre en est un – auquel tout le monde peut jouer.